Shabbat Shalom שבת שלום

Hier soir, un attentat a Tel Aviv, rue Dizengoff, trois blessés dont deux très graves, le terroriste a été éliminé par un passant.
A Beitar Illit, des explosifs découverts à temps dans un bus.
En Samarie, une tentative d’attentat: le terroriste a été éliminé à temps, là encore par un passant, alors qu’il courait, une arme à la main.

Aussi, en espérant nous changer les idées, je voudrais vous presenter la campagne israélienne en fleurs, c’est le printemps.
Le plateau du Golan:

(photo Mishal Ben Rubi)

Tout près du kibboutz Ramot Menashe:

(Photo Yifat Ynuka)

Les iris du Neguev*:

(photo Valeria Feinshtein)

Les amandiers un peu partout,

(Photo Tsipi Eynav)

Les coquelicots*…

(photo Ido Kringel)

et encore d’autres, dans le Neguev:

(photo Ilan Bigan)

Une cigogne dans la région de la Mer Morte:

(photo Nurit Aharon)

C’est aussi notre réalité…

Ce matin, je viens d’entendre Ziv Shilon dont un des amis a été gravement blessé dans l’attentat:

« Je m’y attendais, j’étais sûr que cela allait arriver. C’est un message fort à l’Etat d’Israel et au peuple d’Israel, à tous ceux qui veulent nous diviser: Arrêtez, regardez ce qui se passe ici, nos ennemis nous voient, ils nous connaissent et nous attaquent quand ils nous sentent faibles. C’est leur objectif. Nous devons être unis et ensemble… Nous n’avons pas le droit de nous battre, nous devons parvenir à nous entendre et ne pas être des enfants capricieux, nos ennemis nous regardent…
Trois Israéliens en plus, des dizaines de familles en plus… Nous devons être unis, c’est plus important que tout. Nous pouvons nous entendre sur tout.
Mon ami est un officier de Givati ​​​​qui a servi pendant des années, dans un nombre important d’opérations, chaque fois qu’il était appelé, il venait, prenait son arme, revêtait son uniforme et partait.
Réveillez-vous, les gens donnent leur vie pour ce pays
!

Ce matin, tandis que la ville se réveille, un minyan impromptu sur les lieux de l’attentat:

Je vous souhaite un bon et tranquille shabbat
שבת שלום

A bientôt,

* Iris du Neguev:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/tag/liris-du-neguev/

* Les coquelicots:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2014/02/28/le-sud-en-rouge/

* Ziv Shilon: est un officier Givati qui a perdu son bras au combat en 2012 en combattant contre le ‘Hamas dans la bande de Gaza. Mais il est bien plus que ça:
https://twitter.com/kann_news/status/1512321196167254019


Tu n’assassineras pas ! לא תרצח

Vendredi, un terroriste arabe israélien de Jerusalem, a foncé délibérément sur des gens qui attendaient l’autobus dans le quartier de Ramot. Parmi les morts, deux enfants, deux frères de 6 et 8 ans.

J’ai traduit un texte que la journaliste Sivan Rahav Meir a publié aujourd’hui:
« Deux titres de journaux m’ont sauté aux yeux en même temps:
-Le premier: la délégation israélienne en Turquie a réussi à sauver un garçon de 10 ans qui était coincé sous terre depuis plus de quatre jours.
-Le deuxième: les frères Yaacov-Israel et Asher Mena’hem Paley, assassinés quelques heures avant Shabbat, ont été inhumés aujourd’hui.

Deux titres, deux mondes et un abîme entre eux : alors que des équipes israéliennes voyagent, parfois jusqu’au bout du monde, pour sauver des enfants, ici un terroriste, lui-même père de deux enfants, est parti ce matin-là avec l’intention d’assassiner des enfants juifs, à un arrêt de bus, alors qu’ils étaient en tenue de Shabbat, en route pour un Shabbat familial.

(En haut, les sourires des deux enfants Paley, et en bas, le sauvetage de petit garçon en Turquie. Photo prise sur la page facebook de Sivan Rahav-Meir)


Ce shabbat, nous avons lu les Dix Commandements. Dans les Dix Commandements il est écrit: לא תרצח, Tu n’assassineras pas.
Le texte est brut, il ne donne aucune raison : tu n’assassineras pas ! Rachi, le plus célèbre commentateur de la Torah, Rachi lui-même n’essaye pas d’interpréter ces deux mots: tu n’assassineras pas ! לא תרצח


Dans les classes de Yaacov-Israel et Asher Mena’hem, leurs camarades ont dû réaliser aujourd’hui ce que voulait dire: Tu n’assassineras pas.

Yaakov-Israel et Asher Mena’hem ne reviendront plus en classe. Et le monde entier a besoin d’apprendre la valeur de cette phrase : Tu n’assassineras pas ! »

Il est écrit dans le livre du prophète Yishayahou (26, 21) :


Car, voici l’Eternel qui sort de sa résidence, pour faire expier leurs
méfaits aux habitants du pays : la terre va mettre au jour le sang qui
l’a baignée, et elle ne dérobera plus aux regards les victimes qu’elle a
reçues.
כִּי-הִנֵּה יְהוָה יֹצֵא מִמְּקוֹמוֹ, לִפְקֹד עֲו‍ֹן יֹשֵׁב-הָאָרֶץ עָלָיו;
וְגִלְּתָה הָאָרֶץ אֶת-דָּמֶיהָ, וְלֹא-תְכַסֶּה עוֹד עַל-הֲרוּגֶיהָ.

Nombreux sont ceux qui disent maintenant :N’avons-nous pas assez attendu ?
J’ai entendu ce matin cette expression:


הארץ לא תכסה את דמם
La terre ne recouvrira pas leur sang !

A bientôt,


Shabbat noir שבת שחורה

Ce shabbat, ont eu lieu trois attentats :

Le premier :
Vendredi soir dans le quartier de Neve Yaakov à Jerusalem, le terroriste a tué 7 personnes et en a blessé trois. Il a été éliminé par un civil portant une arme. Dans la tente de deuil, son père a déclaré :
Allah lui a donné un destin de martyr, je veux dire à ceux qui sont assis avec moi – je suis heureux, comme s’il se mariait.

(Site du Yediot Aharonot)

La plus jeune de ses victimes avait 14 ans. Il s’appelait Asher Nathan Morali. Il était sorti après le diner pour rencontrer des amis. Ses parents ont entendu les coups de feu, et ont trouvé leur fils gisant sur le trottoir.
Le couple Nathalie et Elie Mizrahi a été tué au moment où ils sortaient de leur immeuble pour aider les victimes.
Raphael ben Eliahou a été tué devant sa femme qui n’a été épargnée que parce que leur fils l’a fait tomber sur le trottoir en la protégeant de son corps.
Shaoul Hay était le gardien de la synagogue. Il s’y rendait au moment où il a été tué.
Ilya Soshansly avait 26 ans. Il était barman et partait au travail en moto.
Irena Korolova, citoyenne ukrainienne, a également été assassinée lors de l’attentat de Jérusalem. Arrivée en Israël il y a six ans, elle travaillait comme infirmière dans la maison de retraite de Neve Yaakov.

Le deuxième attentat a eu lieu samedi matin dans le quartier de Maalot Ir David, toujours à Jerusalem. Le terroriste a grièvement blessé un père et son fils. Bien que gravement blessé, le jeune homme qui est officier parachutiste a réussi à toucher aux jambes le terroriste et a ainsi évité un carnage. Il est gravement blessé et se trouve à l’hôpital Hadassah. Il se nomme Nadav Hayim ben Irit.

(photo: My Israel)

Le terroriste est âgé de seulement 13 ans. Il était armé d’un pistolet et avait deux chargeurs pleins sur lui. Son jeune âge a fait dire à une des journalistes, Carmela Menashe, que l’éducation familiale ressemblait à celle que donnent les membres de Daesh à leurs enfants. Je me souviens d’un cas similaire*, il y a quelques années: un jeune garçon arabe avait grièvement blessé un enfant juif. J’avais alors publié cette caricature qui m’avait value quelques réflexions outrées de bien-pensants.


Le troisième attentat a eu lieu dans l’après-midi au carrefour Almog dans la vallée du Jourdain. Les deux terroristes n’ont pu tirer qu’une balle car leur arme s’est enrayée. Dans le tweet ci-dessous, le journaliste Hallel Bitton-Rosen explique qu’un des deux terroristes a tiré une balle en direction du restaurant du carrefour Almog mais qu’ils ont réussi à s’enfuir


Dans la soirée une tentative d’attentat à Kedoumim n’a pas réussi. Le terroriste qui rodait dans les buissons a été pris en chasse mais a réussi à s’enfuir.

Cela n’a pas empêché les manifestations contre le projet de loi qui touche aux prérogatives de la Cour Suprême de se tenir comme prévues samedi soir dans les formes habituelles. C’est-à-dire qu’au-delà des contestations politiques acceptables de certains Israéliens sur ce projet de loi, on voyait que d’aucuns brandissaient des drapeaux palestiniens. Ce qui m’a paru inacceptable, particulièrement ce samedi soir.

J’entendais le journaliste Shay Golden à la télévision sur la manifestation qui s’est tenue hier soir à Tel Aviv :


Vous qui manifestez contre la réforme judiciaire vous ne pouviez pas attendre ? Les victimes n’ont pas encore été enterrées, n’avez-vous aucune retenue ?
En ce jour de terreur, brandir le drapeau de l’ennemi et manifester contre le pays. Vous êtes complétement aveuglés par votre haine et vous n’avez aucune empathie pour les victimes et leurs familles.
Vous n’avez pas même pas hésité une seule seconde ? Vous avez perdu toute conscience. Pour moi ceux qui ont manifesté hier soir n’entendent pas le sang de leurs frères assassinés, cela ne les touche pas. N’avez-vous pas pensé une seule seconde : ce soir je reste à la maison ?
Avez-vous pensé au message envoyé à nos ennemis mais aussi à notre peuple ? Nous ne comptons pas à vos yeux ? Vous savez, au moment où vous manifestiez, tous les noms des victimes n’avaient pas été publiés. Toutes les familles n’étaient pas au courant. Nous ne pouvons plus vous croire quand vous expliquez vous soucier du futur de ce pays. Votre intérêt est en fait une posture et non une réalité.
Avez-vous pensé que tous les policiers nécessaires au bon déroulement de la manifestation sont des policiers en moins présents sur les scènes de terreur ?
Vous pouviez attendre quand même un peu, une semaine. Vous savez la shiva* est une coutume de deuil juive…

Sans parler de l’allégresse de nos ennemis victorieux, des Juifs en plein Tel Aviv qui manifestent avec des drapeaux de l’OLP le jour ou 7 de leurs frères ont été assassinés par les organisations terroristes palestiniennes. C’est pour eux une victoire et une raison de plus pour penser qu’ils réussiront à nous mettre en pièces.
Et non, ce n’est pas la minute de silence symbolique que vous avez cru bon d’observer et les quelques bougies qui cacheront les drapeaux noirs anarchistes, les drapeaux palestiniens et les panneaux pleins de haine.
Vous devriez avoir honte, tout simplement.

Voila tout est dit. Je n’ai plus rien à ajouter.

A bientôt,

* Terroriste de treize ans:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2015/10/15/vous-avez-
dit-guerre-de-liberation

*La shiva: semaine de deuil

De gauche à droite (3/5)

Nous savons que certaines organisations de gauche, qui ne comprennent pas et n’acceptent pas le fait qu’Israel puisse être à la fois un pays juif et démocratique, survivent grâce à des fonds conséquents versés par différents pays. J’en avais déjà parlé dans mon article « Ces ONG que nous persécutons* », mais voici ce que j’ai trouvé dans le Jerusalem Post de la semaine dernière:

La majorité des organisations que le ministère de la Justice ciblera dans le projet de loi sur les ONG que la Knesset est en train d’adopter sont des organisations de gauche. Voici la liste des ONG qui montre que 25 des 27 organisations visées par le projet de loi sont de gauche, tandis que deux d’entre elles sont des organisations religieuses politiquement non affiliées. Le ministère de la Justice a communiqué la liste aux médias, fournissant une feuille de calcul indiquant le pourcentage des revenus de chaque groupe provenant de gouvernements étrangers.

Mais de quoi parle ce projet de loi du Ministère de la Justice déjà adopté en première lecture en plénière à la Knesset ? Il oblige toute O.N.G recevant plus de la moitié de son financement d’une entité gouvernementale étrangère à s’identifier comme telle dans toute publication et toute rencontre avec des fonctionnaires.
Evidemment, les parlementaires de gauche se sont joints à ces ONG pour condamner ce projet de loi. Et parmi eux, le président de la Liste arabe unie, Ayman Odeh, qui a déclaré que la liste prouve qu’il s’agit clairement d’une persécution politique et d’un projet de loi intrinsèquement antidémocratique.

Ce sont ces mêmes députés qui soutiennent ouvertement les terroristes et participent aux cérémonies de deuil avec les familles après qu’ils aient été éliminés pendant leurs opérations d’assassinat de civils : Ainsi le maire de Barka el Garbye pérorant à l’enterrement du terroriste tué par Tsahal alors qu’il avait déjà poignardé trois policiers! Et que dire de la journée du Shahid (martyr) célébrée à Um el Fahm :

(Photo Im Tirtsu)

Voici le relevé des financements de ces organisations citées par le Jerusalem Post. Certaines sont connues, d’autres beaucoup moins. Le texte est en hébreu mais simplement en comparant les chiffres de la colonne du milieu (frais de fonctionnement annuels) et celle de gauche (dons provenant de l’étranger), il est aisé de constater qu’elles sont en bonne partie financées par des organismes étrangers.


Matan Peleg, le directeur d’Im Tirtzou a déclaré :
La liste des organisations prouve sans aucun doute qu’il ne s’agit pas de simples organisations de gauche ou de défense des droits de l’homme. Ce sont des organisations de délégitimation qui ne visent qu’à calomnier l’État d’Israël et à réduire sa souveraineté. Ces activités sont financées par des gouvernements étrangers, donc elles [les ONG] gagnent de l’argent grâce au conflit… Il est très étrange que les pays européens soient obsédés par l’envoi de millions d’euros spécifiquement à des organisations de propagande destinées à discréditer l’État juif. Ce phénomène rappelle les temps sombres de l’histoire.

NGO Monitor*, de son côté, a rapporté que 35 organisations israéliennes officiellement pour la paix mais en fait réputées pour leur plaidoyer en faveur d’une politique anti-israélienne, ou pour critiquer durement le gouvernement israélien, sont largement financées par des gouvernements étrangers.

L’une de ces ONG est B’Tselem. Elle a affirmé plus tôt cette année qu’Israël était coupable d’apartheid. Les rapports de B’Tselem ont constitué une partie de la base de l’argument juridique de la procureure en chef de la CPI, Fatou Bensouda*, pour ouvrir une enquête sur les Forces de défense israéliennes, et ceci, bien qu’Israël ne soit pas membre de la CPI et n’accepte pas sa compétence. Environ la moitié du financement de B’Tselem entre 2017 et 2019 provenait des gouvernements européens, tout d’abord du gouvernement allemand puis de l’Union Européenne et ensuite des Pays-Bas*.

Nous avons vécu pendant un an et demi où les post-sionistes dominaient et ou une émanation des Frères Musulmans, le parti Ra’am, participait aux décisions du gouvernement, avec tous les dégâts que nous connaissons en ce qui concerne nos relations avec les Palestiniens mais aussi avec toute une partie de notre population, les Arabes israéliens*.

Comme si cela ne suffisait pas, le même état esprit est déjà bien présent dans les universités et commence à pénétrer les lycées. Ainsi pour le Yom Hazikaron*, jour de commémoration des soldats tombés pendant leur service et les attentats, des organisations de gauche invitent des familles israéliennes endeuillées à parler aux adolescents. Mais cette invitation est aussi adressée aux familles endeuillées des terroristes tués pendant leurs attentats, une facon de créer la confusion en mettant ces deux situations sur un plan d’égalité.
J’ai même appris dernièrement, que certaines écoles israéliennes voudraient commémorer la Nakba*

A bientôt,

* Ces ONG que nous persécutons:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2021/11/03/ces-o-n-g-que-nous-persecutons/

* NGO Monitor ou Non-governmental Organization Monitor, est une organisation israéliennes qui rapporte l’activite des organisations propalestiniennes
Voici leur site en français:
https://fr.ngo-monitor.org/
Vous pouvez y lire cet article sur le financement français de certaines organisations terroristes palestiniennes:
https://fr.ngo-monitor.org/reports/financements-francais-a-des-ong-palestiniennes-nouvellement-designees-comme-terroristes/

* Fatou Bensouda:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2020/01/02/justice-vous-avez-dit-justice/

*Financement de Betselem: En 2020, le revenu total était de 9,9 millions de NIS ; les dépenses totales étaient de 9,8 millions de shekels.
Les donateurs sont : Union européenne, Norvège, Pays-Bas, France, Royaume-Uni, DanChurchAid (Danemark), Trocaire (Irlande), Catholic Relief Services (États-Unis), Christian Aid Irlande, Diakonia (Suède), Bread for the World-EED (Allemagne ), ZIVIK (Allemagne), la Fondation Ford, le New Israel Fund (qui malgré son nom n’est pas israélien mais américain), l’UNICEF et le UNDP.
Sur la base des informations financières soumises au Registre israélien des organisations à but non lucratif, conformément à la loi israélienne sur la transparence des ONG, B’Tselem a reçu 56 104 267 NIS d’organismes gouvernementaux étrangers de 2012 à 2021. Selon les rapports annuels, les dons de pays étrangers représentaient 49,7 % du total des dons de 2017 à 2019. (NGO Monitor)

* Augmentation de la violence arabe en Israel:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2022/03/30/le-terrorisme-arabe-israelien-un-phenomene-nouveau/

* Nakba:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2021/05/23/la-nakba/

Troubles en Jordanie

Depuis quelques jours, la Jordanie fait face à des émeutes sans précédents.
Elles ont commencé par des manifestations et grèves de camionneurs protestant contre l’augmentation du prix de l’essence et paralysant tout le pays car le transport en Jordanie se fait surtout par route. S’y sont joints tous ceux qui dépendent de ces approvisionnements pour pouvoir travailler. Cela concerne en particulier les ouvriers journaliers du bâtiment qui sont au chômage technique.

Des manifestations, des grèves, cela n’a pas l’air très grave et pourtant…

Mais tout d’abord, un peu d’histoire:
La Jordanie est un pays créé de toute pièces par décision unilatérale des Anglais. Ceux-ci amputent en 1923 le territoire accordé au Foyer National Juif tel que le prévoyaient les accords de San Remo conclus en 1920. A la suite d’accords déjà passés pendant la première guerre mondiale avec les princes arabes de la dynastie hachémite, en échange de leur révolte contre les Ottomans, ils en font un protectorat britannique. Ils nomment donc Abdallah 1er, fils de Hussein ben Ali, chérif de la Mecque, émir de Transjordanie.


En échange de son aide, cette fois pendant la deuxième guerre mondiale, Abdallah demande aux Anglais de lui accorder l’indépendance. Ce qui sera fait en 1948. Cet émirat, désormais indépendant, deviendra le royaume de Jordanie en 1949.
Le nom exact du royaume est royaume hachémite. Ce qualificatif est très important pour comprendre ce qu’est la société jordanienne.
La famille royale jordanienne se réclame de Hachim, arrière grand-père de Mahomet. Les Hachémites sont, de génération en génération, les chérifs de la Mecque chargés de la sécurité des lieux saints. Ils sont originaires du Hedjaz en Arabie et donc des étrangers dans le pays qu’ils gouvernent.
La population jordanienne n’est pas homogène: elle est composée de tribus bédouines, arrivées pendant le mandat britannique mais provenant de territoires totalement différents*.
A ces tribus bédouines, il faut ajouter les Palestiniens (près de 70% de la population), qui eux sont arrivés après la guerre d’Indépendance. Ils sont parfois nomades, parfois pas, mais de toute manière considérés comme faisant partie d’une caste inférieure. Pour se concilier la population palestinienne dont il craint la violence, le roi Abdallah a épousé Rania dont la famille est originaire de Tulkarem en Samarie. Mais en vain, car les Palestiniens de Jordanie la considèrent, ainsi que sa famille, comme des traitres qui les ont abandonnés. Il faut dire qu’ils se souviennent des massacres de septembre noir en 1970 qui firent plusieurs milliers de morts quand Hussein de Jordanie décida de se débarrasser de l’OLP qui menaçait son pouvoir, mais aussi de ceux qui lui demandaient un territoire autonome pour créer un état palestinien alternatif (estimations entre 3500 et 10000 morts).
De plus, depuis une dizaine d’années, il faut aussi ajouter le million de réfugiés d’origine syrienne ou irakienne qui sont parqués dans des camps et servent de main d’œuvre servile, comme les 200 000 qui vivent dans ce bidonville, le camp Zaatari, qui est en fait devenu l’une des principales villes du pays.


En marge de ces grèves et émeutes, il y a eu un évènement très important dont la presse internationale n’a pas parlé. Il faut dire que les informations arrivent par bribes car en Jordanie, l’accès à internet est très contrôlé par le régime.
Il y a quelques jours, le vice-gouverneur de la région de Ma’an, le général Abdelrazak Abdel Hafez Dalabyah de la tribu des Abu Del Bakh a été assassiné.

(Le général Abdelrazak Abdel Hafez  Dalabyah, Israel Hayom)

Cet homme, dignitaire du régime, n’a pas été tué par un étranger mais par un habitant de la même ville appartenant toutefois à une autre tribu.
La ville de Ma’an est une ville dont la population est composée de bédouins sédentarisés, mais bien sûr, toujours divisés en tribus. Il s’agit en fait d’un meurtre inter-tribal. Mais pour compliquer les choses, la victime appartient à une tribu qui soutient le régime et le meurtrier à une tribu qui, non seulement ne le soutient pas, mais qui le combat et soutient Daesh que l’on voit régulièrement parader dans cette zone, brandissant le drapeau noir et tirant tout azimut comme toujours.

(Photo The National)

Donc, la querelle entre tribus se complique d’une tentative de renverser le régime en assassinant un de ses piliers.
Ce qui est inquiétant aussi, c’est que la tribu Abd El Bakh de la victime, a refusé qu’un des membres du régime, ni même de la famille royale, n’assiste à l’enterrement du général Abdelrazak Abdel Hafez Dalabyah. Cette tribu a sommé le roi d’arrêter et d’exécuter le meurtrier sous trois jours, ce qui aurait été fait d’après le Jordan Times, qui, lui, parle d’un raid contre une cellule terroriste.
Si la légitimité d’Abdallah est contestée, quelle qu’en soit la raison, par autant de groupe divers, la survie de son régime et même la sienne propre est incertaine. Si on ajoute à ses soucis actuels, les tentatives de coup d’état, comme celui qu’a tenté en 2021 le prince Hamza, son demi-frère, on peut se dire que le roi Abdallah II ne doit pas dormir très bien ces jours-ci…
Il a donc demandé l’aide de son oncle Hassan, fils de Talal, père du roi Hussein, pour parlementer avec les tribus, mais ceci est considéré comme un signe de faiblesse car leurs relations étaient déjà très orageuses…

Et comme à l’accoutumée, il appellera Israel à l’aide comme le signale Edy Cohen* sur sa page facebook

En fait ici en Israel, nous avons deux options:
– soit le laisser se débrouiller tout seul avec cependant la crainte que son régime s’effondre et soit remplacé par un autre régime autoritaire (il n’y a pas de démocratie dans les pays arabes). Autre possibilité plus inquiétante, la Jordanie pourrait sombrer dans des lutes intestines entre bédouins d’Arabie et palestiniens, luttes similaires à celles que nous connaissons en Syrie et en Irak. L’Iran pourrait profiter de cette situation pour s’installer via le Hezbollah à notre frontière, comme il l’a déjà fait au Liban et sur le Golan syrien profitant des guerres civiles dans ces deux pays.
– l’autre option est de soutenir la famille royale à tout prix pour qu’elle puisse survivre, à condition qu’elle s’engage à garder paisible notre longue frontière commune. Toutefois il faudrait pour cela que le roi Abdallah cesse clairement de réclamer à cor et à cris, à l’ONU et ailleurs, que soit créé un état palestinien en Judée-Samarie, qui sera évidemment un état terroriste. En effet la popularité du Hamas en Cisjordanie est telle qu’il est certain qu’un état palestinien indépendant tomberait sous sa coupe immédiatement (cf. ce qui s’est passé à Gaza depuis notre désengagement en 2005). Cet état serait une menace pour Israel mais à terme pour le régime hachémite lui-même dont la population est majoritairement palestinienne.

Ce risque est grand. Il est renforcé aujourd’hui par la position de l’administration Biden qui écoute Abdallah d’une oreille attentive mais aussi par à l’Europe qui prépare un plan depuis des années pour aider les palestiniens à récupérer la zone C confiée aux Israéliens suite aux accords d’Oslo, plan qu’a dévoilé cette semaine la chaine 13 de la télévision israélienne*.

La gabegie jordanienne a conduit ce pays à une sécheresse épouvantable ces dernières années. Israel a proposé de fournir de l’eau provenant des usines de dessalement en contrepartie d’une fourniture d’énergie solaire. Un accord tripartite a même été signé avec les Emirats Arabes Unis, au mois de novembre 2022. Il s’est traduit par de nouvelles émeutes à Aman!
Donc prudence, la paix avec la Jordanie n’est qu’une paix entre états. Le peuple jordanien est loin d’y acquiescer.

A bientôt,

* Mahomet, sa famille et ses descendants:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2020/08/18/jerusalem-une-ville-sainte-pour-lislam-1-3/

* Comment est constituée la société palestinienne:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2018/02/16/une-nation-palestinienne/

* Dr Edy Cohen:

Chercheur au Centre Begin-Sadate. Spécialisé dans les relations inter-arabes, le conflit arabo-israélien, le terrorisme, les communautés juives dans le monde arabe
https://besacenter.org/

* Le plan de l’Union Européenne dévoilé à la télévision israélienne: Il s’agit d’un texte en 6 pages, détaillant l’aide que l’U.E donne aux Palestiniens pour les aider à s’emparer de terres se trouvant dans la zone C, c’est a dire dans la zone de Judée-Samarie entièrement contrôlée par Israel, selon ce qui avait été décide lors des accords d’Oslo.
Ces jours-ci, en réaction à cette information, une quarantaine de parlementaires israéliens a adressé la lettre que voici à l’U.E:

Sur l’arc de Titus à Rome est gravé dans la pierre le chandelier à 7 branches de notre Temple pillé par les légions romaines.
Jerusalem est perdue – Hyerosolomita est perdita ou Hep-Hep – est la devise latine de tous ceux qui voulaient humilier les Juifs exilés en Europe.
En 1930, des graffitis similaires étaient écrits sur les murs à Berlin: Juden nach Palestina! Juifs en Palestine!
Et maintenant que nous sommes finalement revenus sur notre terre, à Jerusalem en Israel, l’Europe clame que nous sommes des étrangers dans notre propre pays et que nous n’appartenons pas à notre patrie.

Si vous voulez en savoir plus sur la guerre d’usure que nous livre l’Europe:
https://www.regavim.org/


Les Druzes et l’enlèvement de Tiran Firo

Le 23 novembre, la veille de l’attentat à Jerusalem, a eu lieu un évènement très grave qui est passé presqu’inaperçu en dehors d’Israel.
Voici les faits : Un Druze de Daliyat el Carmel au sud de la Galilée est parti avec ses deux fils à Djenin pour faire réparer sa voiture à moindre prix. Comme je l’ai déjà écrit*, non seulement Djenin est connue pour être un repaire de terroristes, mais surtout elle est interdite aux Israéliens comme toutes les villes de l’Autorité palestinienne.

(Ce panneau se trouve à l’entrée de Bethelem comme à l’entrée de toutes les zones dépendant de l’Autorité palestinienne)

Mais en fait, ne jouons pas sur les mots: Israélien veut dire Juif israélien car les Arabes et les Druzes israéliens vont régulièrement faire leurs courses à Djenin et contribuent pour beaucoup à la prospérité de la ville

Arrivée près de Djenin, la famille Firo a un accident de la route et Tiran, le fils aîné âgé de 18 ans est grièvement blessé. Il est transféré à l’hôpital de Djenin où il est opéré.

C’est alors qu’une bande armée et cagoulée d’une trentaine de terroristes, fait irruption dans l’hôpital, déconnectent le blessé des appareils médicaux devant son père et son petit frère impuissants, et donc l’assassinent ! Ils kidnappent alors son corps et réclament une rançon à Israel ainsi que la libération d’un certain nombre de terroristes. Les Israéliens, les dirigeants palestiniens, les Américains, les Druzes du Liban…tous interviennent pour essayer de récupérer le corps du jeune homme, mais en vain. Pourtant deux jours plus tard le corps est rendu à sa famille. Que s’est-il passé?

Voici une conférence de Mordekhai Kedar* qui lève le voile sur cette affaire:

En voici la traduction:
Il y a deux jours un jeune homme druze israélien a été victime d’un accident de la route et a été transféré à l’hôpital de Djenin. Là bas, une bande d’hommes armés l’a déconnecté des appareils médicaux et l’a donc tué. Nous ne savons pas exactement qui étaient les ravisseurs mais tout fut mis en œuvre pour récupérer le corps de ce jeune homme.
Les parents de ce jeune homme ont déclaré officiellement à la télévision qu’ils ne voulaient pas que l’armée rentre dans Djenin pour leur rapporter le corps de leur fils, ceci pour ne pas mettre la vie de soldats en danger de mort.

En parallèle avec les pourparlers officiels, les Druzes ont fermé l’autoroute 6 quelques heures, déclarant que lorsqu’on kidnappe un citoyen israélien, la vie des autres citoyens ne peut pas suive son cours normal.
Mais surtout, et c’est le plus important: ils ont eux-mêmes kidnappé quelques Arabes de Judée-Samarie et ils ont publié la photo que je vais vous montrer ici (la photo apparait à 2,51 mn du début de la vidéo). Voici ce qui est écrit:
« Oeil pour œil, dent pour dent. Celui qui a commencé est le coupable ainsi que celui qui nous a fait du mal en agissant contre nous avec violence. Comme nous vous l’avons dit lorsque nous vous avons prévenus. Nous avons arrêté un de vos traitres arabes et, Dieu nous en est témoin, si vous ne nous rendez pas le corps d’un des nôtres, la soif de nos lions ne sera pas étanchée! Prenez garde, vous avez été prévenus! »
Qui était le jeune homme que l’on voit à genoux? Je ne le sais pas. Il se peut même qu’il ait été l’un des leurs. Mais les Druzes ont publié cette photo et ont ainsi envoyé un message sur les réseaux sociaux. Comme nous le savons, les réseaux sociaux sont le moyen le plus rapide pour faire passer les messages et celui-ci a été lu par des milliers de gens en quelques minutes.
Et oh merveille! Les terroristes ont rendu le corps sans attendre!

Ceci me rappelle un autre kidnapping, en septembre 2004: Un journaliste druze , Riyad Ali qui était alors journaliste de la première chaine de télévision a été kidnappé par des hommes armés à Gaza qui refusaient toute négociation. Une délégation de Druzes a alors contacté Arafat. Personne ne sait ce que fut leur conversation mais Riyad Ali a été libéré en quelques heures.
Alors j’ai une question pour vous: Comment se fait-il que les négociations officielles n’avaient alors pas marché mais que la conversation entre les Druzes et Arafat avait été décisive?

Mesdames et Messieurs, Welcome to the Middle East!
Il est vrai qu’un gouvernement efficace est une bonne chose et qu’il n’est pas bon que des milices fassent la loi pour régler les différents. Mais au Moyen- Orient, celui qui parle comme un Européen, essaye de se faire comprendre et d’obtenir qu’on fasse ce qu’il demande en négociant, celui-ci passe pour un faible.
Nous sommes au Moyen-Orient! Les Druzes savent comment parler, savent délivrer le message et savent l’exprimer clairement.
Faite attention à cette photo: Les lettres sont de couleur rouge, pas verte ni bleue ni blanche, non ils ont choisi volontairement le rouge et vous comprenez pourquoi. Ils montrent ainsi clairement que si la dépouille de Tiran n’est pas rendue à sa famille: song sang n’étanchera pas la soif des lions druzes.
Ces Druzes sont des gens du Moyen-Orient, ce sont des gens de la région, il la comprennent, ils comprennent l’arabe, ils savent comment parler à leurs voisins musulmans qui les voient pourtant comme des renégats car ils ont abandonné l’islam*.

Mesdames et Messieurs, nous devons en tirer des conclusions:
Au Moyen-Orient, celui qui veut survivre doit savoir parler la langue de l’autre, la langue arabe. C’est une première chose. Vous savez, les kidnappeurs et autres terroristes ne comprennent pas généralement l’anglais, ni le français ni même l’hébreu, sauf ceux qui ont séjourné chez nous en prison. Non ils parlent arabe et la première des choses à faire est de leur parler dans leur langue, avec les expressions qu’ils connaissent, qu’ils comprennent et en voient le sens.
Et oui, il faut être déterminé! Tu dois être celui avec lequel on ne commence pas une querelle, on ne discute pas; on ne kidnappe pas tes gens ni vivants ni morts. Et ils doivent savoir que si quelqu’un le fait, le prix à payer sera très élevé et même plus. Il ne sera pas du tout proportionnel à l’offense.
Toute cette histoire de réaction proportionnelle* à laquelle nous sommes soumis, à cause des décisions de la Cour suprême, c’est la dernière chose que comprend le Moyen-Orient. C’est exactement ce qui brise notre force de dissuasion. La dissuasion ne marche que si la menace du prix à payer n’est pas proportionnelle. C’est seulement lorsqu’ il y a une menace non proportionnelle que l’autre comprend que la réaction lui sera insupportable! C’est pourquoi, je le redis, la réaction se doit d’être non proportionnelle, exactement comme celle des Druzes quand ils menacent de tuer un être vivant pour récupérer une dépouille. Les kidnappeurs l’ont tout à fait compris et c’est pourquoi ils on rendu le corps de Tiran Firo.
Mesdames et Messieurs c’est ça, le Moyen-Orient. Celui qui veut survivre dans cette région doit en comprendre sa culture, doit comprendre comment on conduit des négociations et savoir comment obtenir les résultats espérés. Si vous ne le savez pas, il vaut mieux chercher un autre endroit dans le monde, bien plus reposant, bien plus moderne tranquille que le Moyen-Orient.
Merci aux Druzes pour cette leçon!
Fin de la traduction.

Le monde nous condamne presque quotidiennement et nous exhorte à être de bons enfants*. Mais rêvons un peu: si nous avions agi comme les Druzes, les familles d’Hadar Goldin et de Oron Shaoul auraient récupéré les dépouilles de leurs fils, et Avera Mengistu et Hisham Sayed… auraient recouvre la liberté et leurs familles*.

A bientôt,

* Djenin:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2022/04/21/djenin-ou-ein-ganim/

*Mordekhaï Kedar: orientaliste; professeur à l’Université Bar Ilan

*Les Druzes se réclament de la filiation midianite de Yithro, beau-père de Moshe. Mais ils ont été islamisés au 7 ème siècle et ont retrouvé leur indépendance religieuse vers l’an mille
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2016/02/12/yitro-et-nous/

* Mordekhai Kedar ajoute: Comme je n’ai pas pu interviewer les kidnappeurs, je ne sais pas si c’est grâce aux efforts conjoints des autorités ou grâce à ce message mais ce qui compte c’est que les kidnappeurs ont rendu le corps.

* Et pourtant, nous sommes toujours condamnés pour usage excessif de la force!

* Devons-nous être de bons enfants?
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2016/02/07/devons-nous-etre-de-bons-enfants/

* Hadar Goldin, Oron Shoul, Avera Mengistu et Hisham El Sayed
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2021/05/21/je-crains-les-cessez-le-feu/
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2021/04/13/yom-hazikaron-les-disparus-de-tsahal/

Des cafés ouverts le shabbat?

Depuis la création de l’Etat et même avant, les discussions, disputes, anathèmes et autres facéties du même genre sur à peu près tous les sujets, sont monnaie courante parmi nous. Que voulez-vous: un Juif, trois opinions!
Parmi les plus communes se trouve le respect des mitsvot dans l’espace public que demandent certains partis alors que d’autres exigent au contraire l’abandon de principes considérés comme le minimum commun depuis la création de l’état d’Israel.
Cette obligation ou non des mitsvot dans la sphère publique communautaire est une vieille querelle qui dure depuis toujours, d’autant que les communautés de diaspora ont pratiquement toujours eu droit à l’autonomie interne, même en temps de grandes persécutions.

Pierre Lurçat a écrit un remarquable article sur la pensée de Jabotinsky en la matière*. J’en publie cet extrait:
« La première distinction, essentielle, est celle de la sphère privée et de la sphère publique. Le constat que fait Jabotinsky dans son article De la religion est tout aussi valable aujourd’hui qu’à son époque :
Cela fait longtemps que nous aurions dû, nous autres Juifs, réviser notre attitude intellectuelle envers la religion… Une attitude positive envers la religion devra s’exprimer d’une manière différente. Par une manifestation positive, par exemple, lors des assemblées des congrès nationaux, des conférences et des assemblées élues – il faudrait qu’ils s’ouvrent par une cérémonie religieuse – et peu importe que leurs membres soient croyants ou “non croyants”. Car ces démonstrations revêtent une signification plus profonde que la question des croyances individuelles, ou celle des doutes de l’individu”.
En somme, ce que nous dit Jabotinsky est que la religion est plus importante pour la collectivité nationale que pour l’individu. Pourquoi ?
Parce que, explique-t-il: Ce qui compte est la manifestation d’une foi puissante et historique partagée par des milliers de personnes.

Malheureusement aujourd’hui, beaucoup tombent dans le manichéisme pour ou contre. Or en consultant des documents historiques de nos communautés, nous sommes parfois surpris par certaines décisions très nuancées, voire surprenantes, telles que celles qu’on trouve par exemple dans les registres du tribunal rabbinique de Prague* sur l’autorisation d’ouvrir ou non les cafés le shabbat, dans le quartier juif de la ville.


(La synagogue la plus ancienne de Prague, l’Altneushul, dont la construction remonte à 1270)

Comment aborder ce sujet et en discuter a-t il été possible dans une communauté connue pour sa piété?
Apparemment cela ne se fit pas sans discussions. Il y en eu de nombreuses et on peut suivre l’évolution des décisions y afférentes: En 1757, l’interdiction est totale: aucun café ne sera ouvert dans le quartier juif pendant le shabbat. De plus les femmes n’ont même pas le droit de fréquenter les cafés les jours de semaine.
Ensuite peu à peu, au lieu de s’opposer à cette nouvelle mode culturelle qui menace la vie traditionnelle, les rabbins de Prague décident de l’accepter sous conditions: la fréquentation des cafés est interdite au moment des prières, de plus le café doit être servi sans lait ou crème de peur de tenter des consommateurs qui ont sans doute mangé de la viande shabbat à midi, et enfin seuls les consommateurs juifs sont autorisés à les fréquenter. Pourquoi? Parce que si les Juifs devaient payer leur consommation à l’avance, avant shabbat, les consommateurs non-juifs, venus par hasard en passant, la payeraient en consommant, et obligeraient le serveur juif à profaner le shabbat. Quant aux femmes, si elles ne peuvent toujours pas y aller ce jour-là, elles ont la permission de les fréquenter les jours de semaines, mais avant 6h du soir!
Pourquoi ces allègements? Il faut dire que le café était devenu un des délices de shabbat* pour beaucoup de Juifs dont, j’en suis sûre, de nombreux rabbins…

De nombreux registres et carnets des décisions rabbiniques ont survécu à la Shoah et actuellement les Archives Centrales pour l’Histoire du Peuple Juif de la Bibliothèque Nationale en détiennent la plus grande collection au monde. En collaboration avec des universités étrangères, ces deux instituts cherchent à localiser, cataloguer et numériser tous les carnets et registres rabbiniques qui nous sont si précieux pour connaitre la vie quotidienne des communautés juives anéanties. Et c’est ainsi que le 20 juin dernier, la Bibliothèque Nationale a organisé un événement international sur ce sujet, avec la participation d’experts du monde entier, y compris une conférence de Maoz Kahana* sur les cafés de Prague et leur ouverture le shabbat.

Et maintenant? Les cafés sont-ils ouverts shabbat ou non? Tout dépend de l’endroit.
Mais la culture du café est bien présente en Israel bien qu’elle ait connu de nombreux bouleversements avec les années. Avant les premières aliyot, les gens buvaient du café bédouin (ou turc) chez eux ou dans des cafés arabes.

(Un café arabe à Yafo en 1911)

Le premier café européen en Eretz Israel a été établi au 19ème siècle dans la colonie allemande* de Haïfa. Dans les décennies suivantes, les immigrants juifs d’Europe ont continué à développer cette industrie, apportant avec eux le café au lait, le strudel à la crème fouettée, les serveurs vêtus de chemises blanches et de nœuds papillon, les thés dansants…

(Café sur la plage de Tel Aviv au milieu des années 30. Photo Les archives sionistes)

Et bien sûr, les journaux, les causeries culturelles et les débats intellectuels autour d’un verre. Dans les grandes villes, des cafés cossus sont devenus le lieu privilégié de la cuture bohème et intellectuelle.

(Le célèbre café Atara à Jerusalem en 1952. Il était alors éclairé avec des lampes à pétrole. Photo: Les archives sionistes)

Dans les villes de développement, ils n’étaient souvent que de petites cabanes où ne servait que du café noir et de l’arak.

(le Café Alyia: un café construit par et pour des nouveaux immigrants à Pardes Hanna en 1951)

L’histoire des cafés en Israel est en fait à l’image de l’histoire de l’immigration sioniste.

Hier, j’ai écrit cet article d’une traite pour oublier l’actualité au moins pour un moment: deux attentats à 7 heure du matin à Jerusalem, le premier à une station de bus à l’entrée de la ville et le deuxième à une autre station de bus dans le quartier de Ramot. Deux attentats avec des sacs d’explosifs remplis de clous et actionnés à distance. Ils ont fait une vingtaine de blessés, dont un dans un état critique et un mort, Arye Shtzupak, un lycéen de 16 ans qui partait à l’ecole.


En entendant les détails à la radio alors que j’essayais d’avancer sur le boulevard Begin les ambulances, motos de MADA* et les blindés de MAGAV* se faufilaient avec peine dans les bouchons et je me souvenais de l’intifada d’il y a 20 ans lorsque les bus explosaient avec le même genre d’engin…

A bientôt,

*L’article de Pierre Lurcat:
https://mabatim.info/2021/09/04/israel-etat-et-religion-en-quoi-la-pensee-de-jabotinsky-est-elle-pertinente-aujourdhui/


*Les registres du tribunal rabbinique de Prague sont aujourd’hui conservés au Musée juif de Prague


*Délices de shabbat ou oneg shabbat est un rassemblement organisé le samedi après-midi et généralement marqué par des discussions et des chants communautaires, et accompagné de gateaux ou autres délicatesses. Ce fut aussi le nom de code d’un groupe d’archivistes dirigé par l’historien Emanuel Ringelblum dans le ghetto de Varsovie avant sa liquidation
https://fr.wikipedia.org/wiki/Oyneg_Shabbos

*Les colonies allemandes: Villages ou quartiers fondés au 19 ème siècle par des protestants allemands, le Templiers:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2015/11/13/les-nazis-en-palestine-dans-les-annees-30/
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2015/01/02/une-autre-bethlehem/


*Maoz Kahana est professeur d’histoire juive à l’Université de Tel Aviv. pour ceux qui comprennent l’hébreu:
https://www.tau.ac.il/profile/maozk

*MADA: Maguen David Adom, l’équivalent de la Croix Rouge et MAGAV: une unité militarisée de garde-frontières fondée en 1953 dépendant de la police d’Israel.

A bientôt,

Les Bithonistim הבטחוניסתים

Si je devais planter le décor de notre vie quotidienne, je peindrais sur une grande toile des éclats de lumière, des senteurs de la terre après le premier Yore*, des rires entremêlés d’inquiétude et surgissant parmi eux les mots בטחון (bita’hon) – sécurité – et בטחוני (bit’honi), sécuritaire, tant nous faisons face aux menaces et attaques quotidiennes de Juifs par des Arabes israéliens, mais aussi face aux attentats presque quotidiens…
Et puis, en toile de fond, j’ajouterais l’inquiétude que provoquent l’accord sur le gaz, l’Iran et maintenant des lendemains d’élections qui nous font espérer et craindre à la fois…

Et donc, pour me changer les idées je me suis penchée sur l’histoire de la racine ב.ט.ח, B.T.’H qui a donné le mot בטחון (bita’hon)
-sécurité- et ses dérivés. Je l’ai cherchée dans le Tanakh et me suis demandé si elle pouvait comme bien d’autres racines nous faire découvrir d’autres horizons.
Dans son entendement courant, le mot בטחון (bita’hon) -sécurité, confiance*-, est associé à la force, à une position sûre et stable loin de tout danger et à la sérénité qui en découle.

comme l’écrivait le prophète Mikha-Michée:

Chacun sera assis sous sa vigne et sous son figuier,

וְיָשְׁבוּ, אִישׁ תַּחַת גַּפְנוֹ וְתַחַת תְּאֵנָתוֹ


Mais voici que dans le livre des Proverbes -Mishlei- , il est écrit:

Le sage craint et évite le mal; le sot se laisse entraîner et se croit en sureté
חָכָם יָרֵא וְסָר מֵרָע – וּכְסִיל מִתְעַבֵּר וּבוֹטֵחַ

L’auteur oppose le sage et le sot qui se laisse entrainer. Pourquoi donc le traducteur du rabbinat rajoute-t-il se croit qui ne figure pas dans le texte originel? Pourquoi ne traduit-il pas tout simplement est en sécurité? C’est que sans le verbe se croit, non seulement la phrase ne voudrait rien dire mais qu’en plus, le traducteur a évidemment lu Rashi*. Il sait que la racine de ce verbe, בטח B.T.’H, être sûr, avoir confiance, signifie aussi tomber.
Et comme Rashi lui-même tient à nous donner des preuves de ce qu’il avance, il va les chercher dans ces versets du livre du prophète Jérémie, d’où il ressort que B.T.’H בטח signifie aussi tomber par terre.
En effet il y est écrit:

Si, luttant de vitesse avec des piétons, ils arrivent à te fatiguer, comment rivaliserais-tu avec des coursiers? Si tu tombes (alors que tu vis) dans un pays paisible, que feras-tu dans les fourrés (région sauvage) du Jourdain?
כִּי אֶת רַגְלִים רַצְתָּה וַיַּלְאוּךָ, וְאֵיךְ תְּתַחֲרֶה אֶת הַסּוּסִים? וּבְאֶרֶץ שָׁלוֹם אַתָּה בוֹטֵחַ, וְאֵיךְ תַּעֲשֶׂה בִּגְאוֹן הַיַּרְדֵּן? ».

(Le Jourdain en Galilée, photo Yonathan Yacobson, Massa A’her)

Cherchons encore:
Bien des années après que le roi Salomon ait fini d’écrire du livre de Mishlé, Jerusalem est alors assiégée par l’Assyrie. Les Assyriens semblent vainqueurs. Le général assyrien Ravshake* se tient aux portes de la ville.

(Soldats juifs écoutant le discours de Ravshake devant les murs de Jerusalem,
détail d’une exposition au musée de la Tour de David)

Il tient un long discours aux Yerushalmim*. Son but est de saper la confiance du peuple et de le persuader d’ouvrir les portes de la ville sans effusion de sang. Il essaie donc de les convaincre que l’Assyrie gagnera parce qu’ils ne peuvent pas compter sur leur force militaire et qu’ils ne peuvent espérer d’aide ni de l’Égypte ni de Dieu.
Ah oui, tu fais confiance à ce roseau brisé, l’Egypte, qui, lorsque quelqu’un s’y appuie, pénètre dans la main et la transperce! Car tel est Pharaon, roi d’Egypte, pour tous ceux qui se fient à lui
(2 rois 18 21).
עַתָּה הִנֵּה בָטַחְתָּ לְּךָ עַל-מִשְׁעֶנֶת הַקָּנֶה הָרָצוּץ הַזֶּה, עַל-מִצְרַיִם, אֲשֶׁר יִסָּמֵךְ אִישׁ עָלָיו, וּבָא בְכַפּוֹ וּנְקָבָהּ; כֵּן פַּרְעֹה מֶלֶךְ-מִצְרַיִם, לְכָל-הַבֹּטְחִים עָלָיו

Là, il s’agit bien de confiance mais d’une confiance mal placée dans un Pharaon semblable à un scorpion. La racine B.T.’H t’appuyer sur, avoir confiance, est aussitôt suivie de l’expression roseau brisé pour que les Juifs doutent du soutien de l’Egypte et que, ce faisant, cela cause leur chute.
Et Ravshake qui connait bien le contexte politique et religieux aussitôt ajoute:

Vous me répliquerez peut-être: « Nous mettons notre confiance dans l’Eternel, notre Dieu!« 
וְכִי-תֹאמְרוּן אֵלַי, אֶל-יְהוָה אֱלֹהֵינוּ בָּטָחְנוּ

Il espère ainsi tourner en dérision leur confiance en Dieu car là encore, selon Ravshake, la confiance en Dieu mal placée, causera leur perte.

Mais n’est-ce pas ce Dieu dont ‘Hizkiahou – Ezéchias a fait disparaître les hauts-lieux et les autels en prescrivant aux gens de Juda et de Jérusalem de ne se prosterner que devant cet autel, à Jérusalem? 
הֲלוֹא-הוּא, אֲשֶׁר הֵסִיר חִזְקִיָּהוּ אֶת-בָּמֹתָיו וְאֶת-מִזְבְּחֹתָיו, וַיֹּאמֶר לִיהוּדָה וְלִירוּשָׁלִַם, לִפְנֵי הַמִּזְבֵּחַ הַזֶּה תִּשְׁתַּחֲווּ בִּירוּשָׁלִָם

Aussi l’académie de la langue hébraïque émet l’idée que le mot confiance, sécurité, ne viendrait pas de la racine B.T.’H בטח mais d’une autre, la racine T.’H טח qui veut dire tomber, mettre à terre!
La racine B.T.’H n’en serait donc pas une, mais en fait un composé de deux mots: la préposition B ב à laquelle s’ajoute la racine T.’H טח. Elle signifierait donc en sécurité autant que en tombant!
Certains linguistes rajoutent: Bien qu’en hébreu, on appelle la pastèque אבטיח -avatia’h- de la racine בטח, B.T.’H, il s’agit bien cependant de la racine T.’H et non pas B.T.’H et nous apprennent que la racine T.’H elle aussi signifie tomber ou être à terre dans d’autres langues sémitiques, d’où le nom arabe de Tikhe’ha pour la pastèque, fruit qui pousse par terre et non pas sur un arbre.
Bref, notre sécurité est parfois bien remise en question!

Depuis quelques années, il semble que les Israéliens retournent vers les fondamentaux du sionisme ou plutôt s’éloignent des convictions des post-sionistes. Les initiatives en faveur d’un renouveau sioniste se multiplient et des mouvements comme Im Tirtsou ou Hashomer ha’hadash* se renforcent. Il en est de même pour le groupe des בטחוניסתים (Bithonistim)* dont le nom vient evidemment de la racine בטח B.T.’H. C’est un mouvement d’environ 16.000 officiers de réserve et agents dans toutes les branches des forces de sécurité qui se présente ainsi:
Nous sommes des officiers, des soldats et des citoyens qui ont pris sur eux la tâche d’assurer la sécurité de l’état d’Israel depuis des générations.
Pour nous, la sécurité de l’état d’Israel ne va pas de soi.
Et donc, nous travaillons pour assurer les conditions de sécurité necessaires pour protéger l’existence de l’état d’Israel en tant qu’état-nation du peuple juif et ceci pour les générations futures. Nous travaillons à formuler et à maintenir une politique de sécurité ordonnée, basée sur la connaissance de la réalité et des menaces qui nous entourent et sur la compréhension du fait que les besoins sécuritaires d’Israel sont à la base de son existence en tant qu’État juif et démocratique.

Le mouvement des Bithonistim a été fondé par de hauts responsables des services de sécurité qui croient en la voie sioniste et sa vérité fondamentale partagée par la plupart des Israéliens : la sécurité d’Israel doit reposer sur sa capacité à se défendre par lui-même et à empêcher activement le développement de menaces. Le mouvement n’est pas hiérarchisé et est heureusement et également ouvert à toute personne qui s’identifie à lui et agit à la lumière de ces valeurs, sans distinction de religion, de race, de sexe, de rang ou de toute autre différence*.
Et voici notre vision:
La mise en place d’un vaste mouvement sioniste dont le but est de placer la sécurité d’Israel au sommet de l’ordre des priorités nationales, de manière à garantir la liberté et la souveraineté du peuple juif dans son pays pour des générations.
La concrétisation de cette vision nécessite la mise en place d’un large mouvement mené par des femmes et des hommes, des commandants issus de toutes les branches des services de sécurité, des chercheurs, des intellectuels et des citoyens de tout horizon de la société israélienne. Un mouvement qui affirmera haut et fort que la sécurité d’Israël est ce qui devrait dicter la politique de l’État d’Israel. Nous ferons entendre notre voix en Israel et à l’étranger
, que ce soit devant un large public ou devant des décideurs

Avez-vous oublié? Seulement 74 ans ont passé depuis la proclamation de l’état d’Israel et déjà certains ont oublié pourquoi ils sont ici, comment cela s’est terminé la dernière fois, et maintenant que nous avons ressuscité, ils ont oublié le prix à payer pour notre patrie, la sueur, les larmes et le sang, ils ont oublié ceux qui ont répondu présents à l’appel, oublié ceux qui tombèrent, des familles, des enfants, oublié les pionniers, la fierté, la maison, ils ont oublié qui est ami et qui est ennemi, oublié la souveraineté, oublié le drapeau, l’estime de soi, et le pire, oublié la vision d’Herzl.
Nous, nous n’avons pas oublié! Et vous, avez-vous oublié?
Nous Habithonistim, les protecteurs d’Israel, officiers combattants, nous sommes ici pour assurer qu’Israel s’épanouira et que la flamme du sionisme brulera pour les générations à venir.

Pendant que j’écris ces lignes, des dépêches nous informent qu’un attentat supplémentaire a eu lieu à Ariel. Il y a plusieurs blessés graves et trois morts: Tamir Avishay, 50 ans, Moti Ashkenazi, 59 ans et Mikhail Ladiguin, 35 ans.

Il est vraiment nécessaire que nous tous ici réalisions qui est notre ennemi et que nous en tirions les consequences.



A bientôt,

* On parle aussi de בטחון עצמי (bita’hon atzmi): la confiance en soi

* Le Yore: Nom donné aux premières pluies après Soukot.

* Les Yerushalmim:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2014/03/02/nous-les-yerushalmim/

* Le discours de Ravshake: Il s’agit d’un discours prononcé par le général en chef de l’armée de Sennacherib en l’an 701 avant l’ère chrétienne. Le mot Ravshake désigne sans doute un titre et non pas son nom propre. La campagne de San’herib (Sennacherib) qui avait bien commencé, se soldera par un échec cuisant. Les Assyriens n’arriveront pas à prendre Jerusalem. Comme il est écrit dans le livre des Rois: Cette nuit-là, l’ange de l’Éternel sortit et frappa dans le camp des Assyriens cent quatre-vingt-cinq mille hommes. Et quand on se leva le matin, voici, c’étaient tous des corps morts. Alors San’herib, roi d’Assyrie, leva son camp, partit et s’en retourna; et il resta à Ninive (2 Rois 19, 35 et 36).
Sur la campagne de San’herib:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2014/01/31/les-torches-de-lakhish-et-dazeka/

* Habithonistim:
https://idsf.org.il/en/

* Im Tirtsou:
Littéralement « Si vous le voulez » est une association étudiante israélienne dont le but est de défendre et promouvoir les valeurs du sionisme. Son nom se réfère à la célèbre phrase de Herzl « אם תרצו, אין זו אגדה » (Im Tirtzou ein zo aggada) Si vous le voulez, ce ne sera pas une légende, par laquelle Herzl faisait allusion à la création d’un état juif .

* Hashomer ha’hadash ou Le jeune garde est une organisation sociale éducative et sioniste créée en 2007 par un groupe de bénévoles pour protéger les terres du pays tout en aidant et en responsabilisant les agriculteurs et les organismes d’application, en plus de connecter les citoyens et les jeunes à la terre, à l’amour de la terre et à une identité sioniste. Les actions d’aide et de connexion se font par le biais d’un volontariat agricole diversifié aux côtés d’activités pédagogiques dont les piliers sont les valeurs de travail acharné, de caution mutuelle, de courage civique et d’amour de la terre.
Mes articles tagues hashomer ha’hadash:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2013/05/20/les-shinshinim/
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2021/08/23/un-terrorisme-occulte-les-incendies/
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2022/01/18/que-se-passe-t-il-dans-le-neguev/
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2022/03/30/le-terrorisme-arabe-israelien-un-phenomene-nouveau/

*Et à ce sujet, je voudrais ajouter ce que j’ai entendu du colonel de réserve Amir Avivi, l’un des bit’honistime: 10 % des bit’honistim sont des druzes et des bédouins qui ont servi dans l’armée car ils souffrent eux aussi de la violence des groupes armés qui mélangent banditisme et terrorisme et sèment la terreur dans les villages et les quartier musulmans:
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2022/06/28/les-raisons-de-la-violence-interne-dans-la-societe-arabe-israelienne/

Comment Jésus est devenu aryen

Le 10 novembre 1938, les nazis entrainèrent la populace à se déchainer contre les Juifs. La Nuit de Cristal fait référence au bruit des vitres des magasins, appartements et 1400 synagogues saccagées. Mais la réalité est bien plus sinistre que cela: une centaine de morts, des centaines de blessés, des victimes de viols, de nombreuses morts par suicide et environ 30 000 arrestations. Un tel acharnement sur seulement 500 000 Juifs vivant en Allemagne et en Autriche pour environ 60 millions d’habitants pour les deux pays réunis!

Des maisons d’enfants, des orphelinats comme celui de Dinslaken ont été saccagés, des malades ont été sortis de leur lit d’hôpital pour être transportés à Dachau. Certains sont morts pendant le transfert et les autres ont été assassinés.

(Les enfants de l’orphelinat en 1935. Yad Vashem)

Les émeutiers ne seront jamais jugés*. Il faut dire que la plupart des victimes auront entre temps été assassinées dans les divers camps d’extermination.

Mais, plutôt que de vous raconter la Nuit de Cristal, ce qui m’intéresse c’est d’essayer de comprendre quel fut le processus de déshumanisation des Juifs.
Un historien américain* a déjà étudié le phénomène de la montée de l’antisémitisme dans une ville où il n’y avait presque pas de Juifs. Il accuse l’entrisme de nazis dans différentes organisations scolaires, culturelles, ce qui qui fut décisif dans un pays où l’appartenance à un groupe (anciens combattants, chorales, organisations sportives etc..) est primordiale.

Mais il y a plus: Nous savons par exemple que les manuels scolaires et la presse répétaient chaque jour que si l’Allemagne n’allait pas bien, c’était la faute aux Juifs. Les Allemands étaient donc mis en condition dès l’enfance.

Cette illustration de 1938 est tirée d’un livre pour enfants Le champignon empoisonné (le Juif). Ici, un enfant apprend à reconnaitre les Juifs selon la forme de leur nez. (Blog The librairians)

Mais il y a encore plus grave: Le rôle négatif des Eglises allemandes en tant qu’institutions
Pourquoi? Parce les enseignements des Eglises sont le fondement culturel de tous les pays d’Europe et qu’il y a maintenant presque cent ans, les Européens, et donc les Allemands, étaient profondément chrétiens.
Je me suis surtout intéressée à leur réaction aux lois de Nuremberg* de 1935, lois discriminatoires concernant tous les Juifs (pratiquants ou pas) mais également les chrétiens d’origine juive puisque la notion d’une soi-disant race juive en était la raison.

(Tableau racial des lois de Nuremberg de 1935. Photo : US Holocaust Memorial Museum)

1- L’Église catholique allemande
Elle est théologiquement unie (et non pas divisée en différentes groupe comme l’Église protestante) puisqu’elle est en fait dirigée par le Vatican.
Les dirigeants catholiques sont initialement méfiants à l’égard du national-socialisme d’autant que l’anti-catholicisme enragé de certains hauts dignitaires nazis les inquiètent. De plus, ils se souviennent de la période du Kulturkampf (ou combat pour la civilisation), pendant laquelle, de 1871 à 1887, le Chancelier de l’empire allemand, Otto von Bismarck, avait mené une politique religieuse coercitive destinée à rompre les liens de l’Eglise catholique avec Rome.
Entre outre, le catholique Deutsche Zentrum (le parti du centre), qui avait été un partenaire clé pour la République de Weimar dans les années 1920, était un farouche opposant au parti nazi. Ainsi avant 1933, certains évêques interdisaient aux catholiques d’adhérer à ce parti.
Mais tout change quand en 1933, Hitler décrit le christianisme comme le « fondement » des valeurs allemandes dans son discours du 23 mars.
Le catholique conservateur Franz Von Papen est nommé vice-chancelier. Le programme de restauration de la grandeur allemande séduit une partie des catholiques. De son côté, le pape Pie XI est inquiet d’un renouveau du Kulturkampf. Dès le mois de mars, il initie des négociations avec l’aide du président du Parti du Centre.
Le 20 juillet, un Concordat est signé entre les Nazis et le Vatican. D’une part, le gouvernement nazi reconnait les associations, les œuvres de jeunesse, l’école confessionnelle et restitue les biens confisqués à l’Eglise catholique. D’autre part: Les nominations d’archevêques, d’évêques et toute autre nomination ne deviendront définitives que lorsque le représentant du Reich aura donné son accord pour ce qui est de savoir si ces nominations ne présentent pas d’inconvénients au point de vue politique générale (article 14 du Concordat).
Et donc, la messe est dite si vous me permettez cette expression!
Nous sommes bien loin de la conférence de Fulda de 1932 qui interdisaient aux catholiques d’adhérer au parti nazi. la NSAP.
Il est évident que ni l’encyclique de Pie XI Mit brennenden Sorge de 1937 où il critique le paganisme et le racisme, ni le fait qu’il déclarera en septembre 1938: Spirituellement nous sommes tous des Sémites, n’auront d’influence sur la population.

2- Les Eglises protestantes:

En 1933, il y avait trois traditions protestantes différentes en Allemagne: 41 millions d’Allemands sont enregistrés à la DEK (Deutsche Evangelische Kirche), d’autres à l’Eglise Unifiée. Quelques millions sont dispersés entre l’Eglise Réformée Calviniste et dans des congrégations comme celles des groupes mennonites.
Dès 1932, la DEK se prononce en faveur du racisme nazi dans un mémorandum. En 1933 elle dirige le nouveau Synode. Les autres Eglises suivent le mouvement.
Seule, l’Eglise Confessante, fondée en 1934 comme opposante au nazisme se prononce en faveur d’un christianisme accessible « à tous les peuples sans distinction de race » et voit dans le « paragraphe aryen », une « violation du statut confessionnel ». Elle condamne théoriquement l’antisémitisme racial mais le considère comme une affaire d’état dont elle n’a pas à se mêler. Elle non plus ne sourcillera pas face aux persécutions qui touchent les Juifs mais aussi les chrétiens d’origine juive.
La seule opposition vraiment claire et nette vient du pasteur Hans Ehrenberg. Le hic est qu’il est un Juif converti. Il aura la chance de fuir en Grande-Bretagne en 1939.

Mais il y a encore plus grave:
Onze des églises protestantes allemandes iront jusqu’à fonder à l’instigation du mouvement chrétien allemand, dans la ville de Eisenach, le Institut zur Erforschung und Bestätigung des jüdischen Einflusses auf das deutsche kirchliche Leben c’est à dire l’ Institut pour l’étude et l’élimination de l’influence juive sur la vie de l’Église allemande.


Cet institut fonctionnera de 1939 à 1945 et sera très influent dans les universités de théologie.
Cette idée d’une purification non seulement de la « race » mais aussi de ce qui est un des fondements culturels allemands, le christianisme, a muri pendant plusieurs année dans le cerveau de Walter Grundmann* (1906-1976) et de son cercle d’amis et disciples jusqu’à ce que les Eglises lui donnent le feu vert et surtout les fonds pour créer cet institut.
En fait, le raisonnement de Grundmann est simple: Notre peuple, qui lutte avant tout contre les puissances sataniques de la communauté juive mondiale pour l’ordre et la vie de ce monde, doit logiquement rejeter Jésus, car il ne peut pas lutter contre les Juifs et ouvrir son cœur au roi des Juifs ». Mais ce type d’affirmation est bien problématique de la part d’un théologien!
Aussi la solution est rapidement trouvée: Jésus n’est pas Juif, c’est un bon Aryen*! Grundmann est rejoint par une foule de théologiens et de pasteurs dans cet institut qu’il dirigera de 1939 à 1945, l’Institut pour l’étude et l’éradication de l’influence juive sur la vie religieuse allemande.
L’un de ses directeurs, Georg Bertam* professeur de Nouveau Testament à l’Université de Giessen écrit en mars 1944: Cette guerre est la guerre de la communauté juive contre l’Europe. Cette phrase contient une vérité qui fut maintes fois confirmée par la recherche de l’Institut. Ce travail de recherche n’est pas seulement adapté à l’attaque frontale, mais aussi au renforcement du front intérieur pour l’attaque et la défense contre toute la juiverie secrète et juive. être, qui a suinté dans la culture occidentale au cours des siècles, … Ainsi l’Institut, en plus de l’étude et de l’élimination de l’influence juive, a également la tâche positive de comprendre le propre être chrétien allemand et l’organisation d’ une pieuse vie allemande basée sur cette connaissance.
En d’autres termes, le but n’est pas seulement de façonner un christianisme pur et non juif, mais de créer une Allemagne sans Juifs. Débarrasser l’Allemagne des Juifs n’est pas seulement un objectif au service du peuple allemand, mais aussi la mission historique mondiale de l’Allemagne.
Pour cela, l’Institut produit une Bible sans Tanakh (Ancien Testament) et réécrit le nouveau Testament en supprimant les généalogies de Jésus qui lui attribuent une ascendance davidique, mais aussi les noms et lieux juifs ainsi que les citations (sauf si elles montraient les Juifs sous un mauvais jour ) et toute mention des prophéties positives pour le peuple juif. Il transforme Jésus en figure militariste et héroïque et aryenne dont le rôle est de combattre les Juifs.

Les lois antisémites de 1935 ne feront donc pas fait grand bruit d’autant qu’elles sont, en somme, les mêmes lois discriminatoires que celles que l’église avait imposées aux Juifs pendant des siècles et jusque dans un passé très proche.
En résumé, un lien étroit va se tisser entre les antisémitismes nazis et théologiques. Dans les deux cas, les Juifs sont considérés comme des adversaires de la germanité, en raison de jugements raciaux et ethniques. Contre le nomos d’Israel, se dresse un nomos folklorique germanique ou aryen, dont le Jésus aryen est le héros qui guide le peuple allemand dans sa lutte purificatrice. Il est donc primordial de préserver la pureté de l’espèce et de la race allemandes. Les Juifs eux-mêmes étant responsables théologiquement de tous leurs malheurs, leur droit à l’existence est théologiquement nié. La lutte de l’État contre le judaïsme s’en trouve donc renforcée car justifiée.

Pour aller plus loin avec Susannah Heschel, professeur d’études juives à l’Université de Dartmouth (vous avez la possibilité d’activer des sous-titres en anglais lisibles malgré de nombreuses fautes surtout dans les noms propres)…

Mais ne croyez pas que tout cela n’est que vieille lune et histoire du temps passé. Ce n’est pas seulement que le grand mufti de Jerusalem Hadj Amin al Husseini créa des légions SS en Europe et des troupes de choc, les Einsatztruppen, qui devaient se charger de l’extermination des Juifs en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.
L’histoire se répète et c’est actuellement la société palestinienne qui subit un endoctrinement de même nature qui a les conséquences que nous connaissons tous et dont nous avons eu un exemple supplémentaire hier soir: trois missiles lances depuis Gaza et surtout une adolescente de Kiriat Arba, Tamar Bat Nira, qui a reçu une balle dans la tête. Elle est entre la vie et la mort à l’hopital Hadassa.

A bientôt,


* Quelques assassins malchanceux ont été jugés près la guerre mais ils ne furent que légèrement condamnés ainsi les assassins de Mina Tsek qui vivait alors à Neidenburg en Prusse Orientale.
https://fr.timesofisrael.com/des-temoignages-de-la-nuit-de-cristal-autrefois-perdus-dans-lhistoire/

* Il s’agit de William Sheridan Allen (1932-2013) qui écrivit The Nazi Seizure of Power: The Experience of a Single German Town 1930-1935 (traduit en français sous le titre Une petite ville nazie)

*Lois de Nuremberg et le paragraphe aryen:
https://museeholocauste.ca/app/uploads/2019/03/lois_antijuives_chrono.pdf
Les lois raciales mises en œuvre par le Parlement allemand à Nuremberg, le 15 septembre 1935 sont devenues la base légale de la politique raciste antijuive en Allemagne. Treize décrets supplémentaires ont été ajoutés au Lois de Nuremberg au cours des 8 années suivantes. Elles définissaient officiellement qui était Juif et qui était aryen, La première loi fut appelée Loi sur la citoyenneté du Reich et en exclus les Juifs. La deuxième, la loi pour la protection du sang et de l’honneur allemand interdisait les mariages mixtes, l’interdiction de l’emploi de personnel non-juif de moins de 45 ans et interdisait aux Juifs le salut du drapeau. Les lois de Nuremberg ont fourni un mécanisme juridique « légitime » pour exclurent les Juifs de la société allemande.
Ce qui est appelé le paragraphe aryen est cette classification entre Aryens, Juifs, Métisses, quart de Juifs. Les chrétiens d’origine juives étaient Juifs selon les lois de Nuremberg.

*Walter Grundman et ses amis ne seront pas inquiétés après 1945. Lui-même travaillera pour la STASI en Allemagne de l’Est

* Il est vrai que Dietrich Boendorfer a tout d’abord fermement refusé d’exclure les chrétiens juifs de l’Église allemande mais finalement son opposition officielle à cette exclusion dans un texte rédigé avec le pasteur Niemoller a été plus qu’édulcorée. Il faut noter que lui même faisait preuve d’un antijudaïsme théologique tout à fait convaincu.
Il est vrai aussi que le pasteur Niemoller (1892-1984) a été arrêté en 1937 sur ordre d’Hitler et envoyé dans deux camps de concentration en tant que fondateur de l’Eglise confessante. Il considérait qu’Hitler l’avait personnellement trahi car il lui avait promis de ne pas s’en prendre physiquement aux Juifs, à seulement les restreindre (les lois de Nuremberg). Hitler lui aurait dit en 1932 Il y aura des restrictions contre les Juifs, mais il n’y aura pas de ghettos, pas de pogroms, en Allemagne. Pour Niemoeller les Juifs tenaient trop de place dans la société en particulier les Sionistes (!), les Juifs de l’est, et les Juifs athés… Il justifiait l’antisémitisme par toutes sortes de raisons. En somme un antisémitisme convenable…

* Jésus aryen: Si vous voulez aller plus loin, cet article de Mireille Hadas-Lebel:
https://www.ajcf.fr/IMG/pdf/160214-MHL-Jesus-aryen.pdf

* Le nazisme dans la société palestinienne:
https://www.terrorism-info.org.il/app/uploads/2021/10/E_154_21.pdf
https://www.memri.org/reports/neo-nazis-look-forge-bromance-jihadis
https://bokertovyerushalayim.wordpress.com/2022/08/21/les-nazis-nhabitent-pas-loin-de-chez-moi

Le dentier de sœur Odile

Un article léger, pour des jours qui le sont moins

En 1956 le journal américain Life publia un article sur une histoire peu banale, celle du dentier d’une religieuse tombé dans le no man’s land entre Israel et la Jordanie.
Que s’était-il donc passé?
Nous sommes en 1956. La ville de Jerusalem est coupée en deux depuis les accords d’armistice de Rhodes en 1949. La ligne de démarcation n’est pas qu’une ligne, c’est une large bande, parfois bien plus qu’une bande. Ce sont des terrains vagues, minés, qui séparent les côtés israélien et jordanien.

(Le quartier de Mamilla en 1949)

Il s’agit donc d’un no man’s land dans lequel il est évidement interdit et dangereux de s’aventurer, le seul point de passage entre les deux parties de la ville étant la porte Mandelbaum*,


Seul passage officiel entre Israël et la Jordanie, il était utilisé pour le passage des diplomates et des membres des différentes églises.


Le journaliste de Life détaille la situation du monastère de Notre Dame de France qui se trouve du côté israélien, mais dont les murs donnent sur ce no man’s land. Il écrit qu’un matin, une des sœurs, ouvrant la fenêtre, a été prise d’une quinte de toux si forte qu’elle en a laissé échapper son dentier qui est tombé à l’extérieur.
Au premier abord, il était facile de le récupérer: elle sortait du bâtiment, passait sous la fenêtre et récupérait ses dents, mais si les dents étaient tombées à l’extérieur du bâtiment, elles étaient aussi tombées à l’exterieur des limites de l’état d’Israel! Que faire?
La religieuse s’est adressée aux soldats de Tsahal en poste à quelques mètres et leur a demandé de récupérer son dentier.
Impossible! Il leur était formellement interdit de franchir les barbelés, car ils auraient pu provoquer un incident grave avec l’armée jordanienne… L’armée israélienne décide donc d’en référer aux troupes de l’ONU qui stationnent à Jerusalem. L’ONU accepte de contacter les Jordaniens, et voilà que des officiers israéliens, jordaniens et le délégué français des forces de l’ONU, le commandant Carnot, agitant son drapeau blanc, tous se mettent à quatre pattes pour finalement dénicher le dentier entre les épines et les barbelés et le rendre à sa propriétaire qui le tient joyeusement entre ses doigts comme on le voit sur la photo.

Pourtant, cet article comporte une erreur:
Tout d’abord le couvent Notre Dame de France est un couvent de moines et non pas de religieuses. Le seul bâtiment chrétien dont les fenêtres donnent aussi sur le no mans land est l’hôpital Saint Louis, lui est géré par des religieuses hospitalières françaises et donne lui aussi sur la ligne de démarcation.

(L’hopital Saint-Louis est au premier plan à gauche et plus loin à droite le couvent Notre Dame de France)

Mais surtout, si vous regardez bien la religieuse sur la photo de Life, elle a toutes ses dents, vraies ou fausses. Alors? Qui a perdu son dentier?
Le photographe de Life, David Rubinger, a expliqué qu’il ne s’agissait pas d’une religieuse mais d’une patiente de l’hôpital, Myriam Zahadi, qui était parait-il restée plusieurs jours honteuse de son état dans sa chambre, avant que la mère supérieure en réfère à Tsahal. Mortifiée, elle n’a pas voulu être photographiée et c’est une des religieuse qui a accepté de la remplacer. David Rubinger lui avait demandé de sourire bouche close mais la religieuse était tellement amusée par le cocasse de la situation qu’elle n’a pas pu s’arrêter de rire et de sourire, et a finalement été photographiée ainsi, toutes dents dehors.
On pardonnera facilement les journalistes de Life d’avoir confondu l’hôpital Saint Louis et le couvent de notre Dame de France mais que dire de Colette Avital*, membre du parti travailliste (Avoda), députée à la Knesset?
Dans son autobiographie « La petite fille à la cravate rouge », Colette Avital rapporte cette anecdote.

Elle se rappelle bien son premier jour de travail au Ministère des Affaires Etrangères où elle travaillait dans le département chargé des relations avec la Jordanie, et ceci les jours précédents la guerre des 6 jours. Elle reprend ainsi l’histoire: Une religieuse s’est penchée par la fenêtre et son dentier est tombé dans le no man’s land. On m’a priée de rendre l’objet perdu à la religieuse, Aussitôt, j’ai constitué une équipe spéciale habilitée à cette opération. Il y avait deux officiers israéliens sans peur ni reproche, deux officiers costauds des forces de l’ONU et deux Jordaniens pleins de vie (sic!). Je les ai envoyés dans le no man’s land récupérer le dentier. Je leur avais donné un drapeau blanc mais ils ne pouvaient compter que sur eux mêmes.
Quelle histoire romancée! Mais même un romancier se doit d’être logique:
Tout d’abord, bien que d’après ses dires, elle ait été responsable de l’opération, un peu plus loin dans l’article, elle confond elle aussi l’hopital Saint Louis et le monastère.
Mais il y a plus grave: toujours d’après ses dires, l’opération a eu lieu sous sa responsabilité alors qu’elle commençait à travailler au Ministère des Affaires étrangères en 1967, or Life a publié son article en 1956, soit 9 ans avant.
Pour Colette Avital, les années passent vite, elle a du oublier qu’en 1956 elle n’avait que 16 ans!
A-t-elle tant d’imagination? Non en fait, elle recycle cette histoire, s’en attribuant toute la gloire, en recopiant tout simplement quelques phrases du livre Une Jerusalem publié par Uzi Narkiss qui était alors commandant de Tsahal et participait régulièrement aux réunions de l’Etat Major.
Comme l’écrivait La Fontaine:

(Dessin d’Henri Avelot 1932)

   

A bientôt,

PS: Je reçois aujourd’hui un mail de mon amie Henriette:
Merci pour l’histoire du dentier : c’est un sourire dans une actualité très déprimante.
Dans la famille de Yossi une histoire de la même eau : son frère qu’on appelle « Pierrot », à l’âge de 9-10 ans a eu la lumineuse idée avec un copain d’aller pique-niquer et donc cuire des pommes de terre dans le no man’s land entre les deux Jérusalem. Tout de suite les herbes sèches se sont enflammées, les mines ont commencé à sauter, les pompiers israéliens et jordaniens ont foncé et même l’ONU avec drapeau blanc  est arrivée sur zone ! Evidemment  les deux gamins se sont enfuis, Pierrot se réfugiant sous son lit. D’après un neveu, l’histoire est racontée dans un livre sur l’Histoire de Jérusalem !
Pierrot enfant , était le seul casse-cou de la famille, celui qui fait des bêtises sans arrière-pensée. Bien sûr en 73 il était parachutiste dans le Golan et ensuite, il est devenu policier (maître-chien). Aujourd’hui il est bien sûr sage et retraité, câlinant ses trois fill
es, ses deux petits-enfants, son chien, ses oiseaux, ses poissons et bien sûr son épouse qui, elle aussi l’aime comme au premier jour !